Module 5 : Quel impact pour la famille ?
Ce module porte sur les conséquences de l’apparition précoce des maladies neurodégénératives pour les familles.Les questions suivantes y sont abordées :
- comment changent-elles les relations entre les personnes malades et leur famille ?
- quelles conséquences ont-elles sur les conjoints, leurs besoins et leurs attentes ?
- comment les enfants et les adolescents vivent-ils l’apparition de la maladie chez un parent ?
- comment parler de la maladie avec la personne malade, avec les membres de la famille et avec l’entourage ?
- quelles émotions difficiles peuvent ressentir les personnes proches de malades ?
Des conséquences pour l’ensemble de la famille
L’apparition de la maladie modifie les relations du malade avec les autres membres de la famille et entraine une redistribution des rôles et des tâches, tout au long de la maladie.
Sarah Boucault, psychologue clinicienne, nous explique les conséquences de la maladie dans le cercle familial.
Changements dans les relations
Le changement des relations familiales présente deux aspects importants : la modification des rôles au sein de la famille et le changement de comportement de la personne malade.
Redistribution des rôles
Pour faire face aux nouvelles tâches et responsabilités, il est important de mettre en place un réseau de soin afin de répartir la charge de travail entre les membres de la famille, ou en engageant des professionnels. En identifiant nos limites, on peut éviter la surcharge.
Exemples
Le changement de rôles peut générer des tensions et des conflits au sein de la famille et peut être associé à des sentiments de frustrations ou de rancœur. Voici des témoignages :
« Mon mari était électricien. Il faisait toutes les réparations à la maison. Aujourd’hui, changer une ampoule électrique est devenue une réelle épreuve pour lui. Cela m’attriste. »
« Je suis soignante, mère et infirmière. Je le traite comme un enfant durant les trois quarts du temps, puis je dois inverser mes rôles pour redevenir épouse. »
« Aujourd’hui, je gère toute l’entreprise. Avant l’apparition de la maladie, mon mari s’occupait de l’aspect commercial de l’entreprise et je ne m’occupais que des comptes. »
« Maintenant, c’est moi qui me soucie des anniversaires. C’était quelque chose que ma femme faisait depuis des années. Je dois désormais me souvenir des dates et des cadeaux à faire. »
Redéfinir la relation avec son proche
Le changement de la relation et le sentiment de perte d’un être cher sont des processus difficiles. La vidéo ci-dessous propose des suggestions pour mieux comprendre les sentiments qui vous traversent, de mieux identifier vos besoins afin de trouver des stratégies d’adaptation.
Exemples
« La personne qui m’embrassait et qui me disait des mots doux me manque. Il manque cette personne qui me dit qu’elle m’aime et qu’elle aime ce qu’elle fait. »
« La personne que j’ai tant aimée et avec qui j’ai eu une vie sexuelle n’est plus là. Je ne sais pas si la façon dont nous vivons aujourd’hui ensemble peut être appelée « relation de couple. »
« Je suis contente qu’il soit avec moi et je lui dis que je l’aime, bien que je pleure la perte de son sourire. »
L’intimité
La vidéo ci-dessous aborde la question de l’intimité et propose des stratégies et des conseils pour s’ajuster aux changements dans les relations intimes.
Enfants et adolescents
Beaucoup de personnes malades jeunes ont des enfants qui vivent encore chez eux. Les enfants peuvent rencontrer des difficultés émotionnelles particulières si l’un des parents perd son indépendance ou se comporte de manière étrange, embarrassante ou bouleversante. Les enfants peuvent non seulement avoir besoin d’assumer des responsabilités familiales, mais ils peuvent aussi perdre un modèle important. Certains peuvent même entrer en conflit avec leurs parents. Les enfants peuvent avoir des difficultés à inviter des amis à la maison et peuvent essayer de cacher le problème. La maladie d’un parent peut aussi compliquer l’indépendance des enfants, leur vie sociale ou leur déménagement.
Exemples
« S’il avait seulement accepté sa maladie, cela aurait été plus facile. »
« Il ne sera peut-être plus là lorsque je me marierai. J’essaie de lui montrer mon amour, mais je ne sais pas s’il le ressent. »
Les enfants et les adolescents réagissent différemment aux changements du comportement des parents. Certains manifestent du chagrin, de la colère ou du dégoût, d’autres se sentent coupables. Certains développent des troubles physiques tels que des maux de tête ou des troubles du sommeil. Pour d’autres, la scolarité et le comportement à l’école peuvent devenir problématiques.
Soutien
Il est conseillé de parler ouvertement de la maladie. Vous pouvez expliquer que les comportements de votre proche malade sont une des conséquences d’un trouble du cerveau. La quantité d’informations et d’explications concernant la maladie doivent être adaptés à l’âge et au niveau de compréhension de chaque enfant. Les enfants doivent savoir qu’ils ne sont pas responsables de la maladie. Il est également important que les amis proches des enfants soient informés de la maladie du parent et que leurs activités sociales soient maintenues. En outre, les enfants et les adolescents devraient être encouragés à se renseigner davantage sur la pathologie, en lisant des livres ou des sites internet d’une source fiable.
Les enfants ont besoin d’une personne, en qui ils peuvent avoir confiance, au sein de la famille ou à l’extérieur. Le soutien d’un psychologue peut être utile pour naviguer les conflits et traiter les questions difficiles. En outre, la situation de l’enfant peut-être discutée avec ses enseignants. Ils peuvent trouver des solutions pour pallier aux éventuelles difficultés scolaires. Il peut par exemple s’agir d’aborder le sujet des maladies neurodégénératives lors d’un cours pour susciter la compréhension entre camarades de classe.
Responsabilité
Les enfants sont amenés à prendre soin de la personne malade, voire de prodiguer des soins. Dans ce cas, leurs responsabilités doivent être clairement définies et limitées. Certaines activités sont moins appropriées pour les enfants, comme par exemple la toilette de la personne malade. Les enfants ont besoin de temps pour eux, d’un espace de repos et d’une vie privée pour leurs devoirs et leurs loisirs. Ils ont besoin d’être rassurés, sur le fait qu’ils ne sont pas responsables du bien-être ou de la sécurité de leur parent malade. Si les enfants plus âgés sont sur le point de quitter la maison familiale, encouragez-les et soutenez-les pour réaliser leurs objectifs. Développer leur indépendance peut soulager certaines tensions et éviter des conflits au sein de la famille.
Parler de la maladie
Parler de la maladie avec la personne malade
De nombreux aidants doutent de leur capacité à parler de la maladie avec leur proche malade. Est-il approprié de parler ouvertement de la maladie, ou devrait-on éviter le sujet ? Qu’en pensent la personne malade ? Au début de la maladie, les malades sont souvent conscients que quelque chose ne va pas et qu’ils deviennent de plus en plus dépendants de leurs conjoints. Toutefois, l’anosognosie, un symptôme neurologique, peut réduire leur conscience des troubles neurologiques. Certains malades peuvent souhaiter protéger leur estime de soi et refusent d’être considérés comme malade. En fonction du niveau de conscience des difficultés chez votre proche, vous pouvez essayer d’écouter leurs plaintes et d’aborder leurs difficultés de mémoire ou de concentration, afin de les soutenir. Le dialogue est plus facile quand la dignité de la personne est conservée, en évitant de blâmer ou de critiquer. Parfois la personne malade peut se sentir ‘définie’ par son diagnostic ou réduite à sa maladie – pour éviter cette perception, rappelez-vous de tout ce que la personne est au-delà de la maladie, et continuez à la consulter sur des décisions du quotidien et la concernant, à un niveau adapté à ses difficultés.
Parler de la maladie avec les amis et voisins
Communiquer au sujet de la maladie peut s’avérer difficile avec les amis et voisins. Ils peuvent éviter le sujet, pour diverses raisons et d’autres se montrent réticents face à la maladie. Ils peuvent avoir des difficultés pour interagir avec la personne malade. Il peut être utile de parler de la maladie avec des amis ou voisins en qui vous avez confiance. Dans la plupart des cas, si vous parlez ouvertement des symptômes de la maladie, y compris des comportements qui ont changé, les gens se montreront compréhensifs et solidaires.
Exemples
Quand je suis dehors avec elle – elle est tellement joyeuse et à l’air physiquement bien – que les gens disent toujours : « Eh bien, elle a l’air tellement bien, qu’on ne dirait pas qu’elle est malade. »
Et je réponds : « Eh bien, la maladie ne se voit pas de l’extérieur, vous savez. »
« J’avais peur que nos voisins trouvent mon mari impoli car il ne se souvient plus de leurs prénoms et donc évite de les saluer. J’ai préféré leurs expliquer qu’il a des problèmes de mémoire, pour éviter un malentendu entre nous. »
Cartes informatives
Il peut être nécessaire de mentionner la maladie dans les lieux publics tels que les magasins, les supermarchés ou les restaurants, pour des raisons pratiques. Dans telles situations, il n’est souvent ni possible ni souhaitable, d’expliquer la maladie ou certains comportements en détail. Pour faire face à ces situations parfois gênantes, des cartes informatives peuvent être utiles. Ces cartes ressemblent à des cartes de visite et stipulent que la personne est atteinte d’une maladie neurodégénérative et qu’elle a besoin d’une certaine attention. Globalement, les gens agissent de manière positive lorsqu’ils apprennent que les comportements inhabituels sont causés par une maladie.
Vivre des émotions difficiles
En tant qu’aidant, vous êtes susceptible de ressentir un large éventail de réactions émotionnelles à propos de votre situation. Les émotions qui surgissent, comme le chagrin, la colère ou la culpabilité sont tout à fait normales et saines.
La peine
La peine est une réaction normale à un sentiment de perte. Comme la maladie de votre proche évolue, vous ressentirez des sentiments différents. Cette vidéo aborde la notion de peine et de chagrin. Des conseils pour faire face à la douleur morale sont proposés.
La colère
Il y a beaucoup de facteurs qui peuvent vous pousser, en tant qu’aidant, à ressentir de la colère et de la frustration. La vidéo ci-dessous aborde la question de la colère et la frustration et propose des solutions saines pour y faire face.
La culpabilité
Beaucoup d’aidants familiaux rapportent un sentiment de culpabilité. Vous pouvez parfois vous sentir coupable de ne pas avoir bien gérer une situation, ou même de prendre du temps que pour vous. Dans la troisième vidéo, on aborde des techniques pour faire face à la culpabilité.
Documents associés
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